Entre deux séances d’écriture pour le Feuilleton des Frimas et de traduction pour Leçons de magie fae, j’ai continué à mettre à jour lunefraise.com avec les livres qui manquaient, ceux de Mages de la rue Monge et les recueils d’Halloween.
Ceci porte à 39 le nombre de titres disponibles dans la boutique (romans et recueils, je ne compte pas les nouvelles et les bundles, ni les différents formats papier.)
Au passage, je fais un peu de rangement et de mises à jour, car certains de ces titres commencent à être anciens, en tout cas à ma petite échelle. Terminés avant le covid, ils me semblent parfois appartenir à une autre époque.
Et ça n’avance pas très vite : quand je teste pour vérifier que tous les branchements fonctionnent bien, je me fais régulièrement happer par mes propres histoires, et je perds du temps à les redécouvrir 🤪 en particulier les Mages de la rue Monge.
J’adore les Mages, probablement parce que c’est une saga puissamment ennéagramme 4, originale jusqu’à la moelle, mais qui parle aussi des liens du clan. Et j’aime bien ses différentes romances qui s’entrecroisent.
Et maintenant, il ne me reste plus « que » 11 livres à mettre en ligne en bonne et due forme sur lunefraise.com pour réussir mon challenge. J’ai fait les titres « faciles », et il me reste quelques romances d’Eleonore Marco à charger — c’est la prochaine étape. Après, il faudra que je fasse quelques annonces 😀
Pour ça, je vais devoir ouvrir des précommandes, sortir des titres de l’ombre, et créer de nouvelles couvertures… stay tuned 🙂
En attendant, puisque le solstice approche, voici le début du Futur, le tome 3 de Mages de la rue Monge.
Chapitre 1
ALEX
Dimanche 15 décembre, 10 h
— Bordel, j’en ai marre ! hurle la voix dans le miroir.
Dans la salle de bain immaculée, l’explosion verbale détonne et heurte, bousculant mon petit monde et brisant en mille éclats la sérénité que je viens, en général, rechercher dans cette pièce. C’est si soudain que je pousse un cri et que j’en lâche mon mascara. Le mince tube noir va rebondir sur le carrelage blanc et rouler sous la petite commode en bois clair.
Je soupire, inhalant en profondeur le parfum apaisant du savon et du shampoing à la rose musquée. Puis je me baisse pour ramasser le mascara, en espérant vaguement que mon reflet aura disparu quand je me tournerai à nouveau vers le miroir illuminé de spots.
Mais non, je me redresse et elle est encore là. Il est passé, le temps où je savais à coup sûr ce que je trouverais en me regardant dans le miroir.
La fille en face est mon double, en négatif. Certes nous nous ressemblons pas mal, physiquement, toutesles deux blondes, les yeux bleus, les traits passablement symétriques, et de taille moyenne. Mais j’aime le blanc et elle ne porte que du noir, depuis sa chemise qui révèle un bon démarrage de soutif en dentelle (noire), jusqu’à ses ongles vernis de noir, ses yeux maquillés de khôl, en passant par ses bijoux — un collier d’onyx qui brille d’un éclat rageur et une série de bracelets de cuir noir à fermoirs d’argent.
Elle s’appelle Axelle, elle n’est visiblement pas d’humeur pour les fêtes, et contrairement à moi, elle ne recule pas devant les gros mots.
— Je déteste Noël, je pisse à la raie de Saint-Nicolas, je conchie les chants cucul qui passent constamment sur ta chaîne. Sérieusement ? Tino Rossi ? Tu veux ma peau, c’est ça que tu veux ? J’en ai par-dessus la tête des bons sentiments, des chocolats de merde et de ton sapin qui pue la résine. J’en ai marre marre marre marre marre MARRE !
J’ouvre la bouche pour en placer une et peut-être la prier de se montrer un peu moins grossière, mais c’est trop tard. De l’autre côté du miroir, Axelle sort de la salle de bain en claquant la porte et me laisse seule, le cœur battant et la bouche sèche, avec mon reflet ordinaire et sans histoire, celui qui fait toujours ce que je lui demande.
J’avoue, je me fais un peu de souci pour Axelle ces derniers temps. On ne se connaît pas encore très bien, mais je la trouve un peu négative.
Quelqu’un toque à la porte de la salle de bain.
— Alex ? s’inquiète Nina, ma colocataire. Ça va ?
— Oui, oui.
Nina n’a pas pu entendre Axelle. Il n’y a que moi qui sois capable de la voir et de l’entendre. Moi, et les membres d’une certaine famille de sorciers habitant rue Monge, dans le cinquième arrondissement.
— C’est juste que t’as poussé un tel glapissement… insiste Nina. On n’a plus d’eau chaude ou quoi ? Il y a une araignée géante dans la douche ?
— Mais non, Nina, je te jure que tout va bien.
En fait, ça ne va pas hyper bien, parce que je viens de me faire agresser verbalement par mon double, mais je vais m’en remettre, ça va aller. Et puis si Nina savait, elle me prendrait pour une dingue. L’existence d’Axelle est un développement récent dans ma vie et je n’ai pas encore trouvé l’angle adéquat pour aborder la question avec mes proches.
D’ailleurs, je ne sais même pas trop exactement ce que je suis censée leur dire. De loin en loin, en bonne aspirante réalisatrice, j’essaye de me représenter la scène.
INTÉRIEUR JOUR, un pavillon à la décoration bourgeoise et de bon goût.
Alex passe la porte d’entrée et est accueillie par ses parents.
ALEX
Salut, Papa, Maman.
PAPA
Ma douce !
MAMAN
Ma gazelle!
Ils s’embrassent affectueusement.
ALEX
Au fait, j’avais une question à vous poser. Euh, quand j’étais petite, vous n’avez rien remarqué de bizarre? Une amie imaginaire un peu envahissante? Une relation étrange avec les miroirs?
PAPA
Mais non, ma linotte, qu’est-ce que tu racontes?
MAMAN
Tu as toujours eu beaucoup d’imagination.
ALEX
Non, mais là c’est sérieux. Depuis l’automne j’ai un… comment dire, un double maléfique. Elle s’appelle Axelle et elle vit dans les miroirs. Je crois que c’est parce que j’ai traîné avec des sorciers, on n’a presque rien fait, je vous assure. Enfin, bref, avec Axelle, on leur a sauvé la vie deux fois, et maintenant… comment dire…
AXELLE, depuis le miroir de l’entrée, sans que PAPA et MAMAN n’aient conscience de sa présence
Salut APAP et NAMAM! Vous me remettez? C’est moi, le cauchemar du miroir. Je suis née de l’imagination débordante de votre fille et de son goût immodéré pour le cinéma d’horreur! Ce qu’Alex essaye de vous dire, c’est qu’elle en pince pour un type qui n’habite pas dans la même réalité qu’elle.
ALEX, se tournant vers le miroir pour faire taire AXELLE
Arrête! C’est même pas vrai. Tu racontes n’importe quoi!
PAPA et MAMAN échangent un regard perplexe & effrayé.
MAMAN
Tout va bien, ma chérie? Tu parles à ton reflet maintenant?…
FONDU AU NOIR
Mnoui, je ne le sens pas très bien.
— Si c’est possible, insiste Nina de l’autre côté de la porte, tu veux bien te dépêcher un peu ? J’ai rendez-vous avec Dimitri pour aller faire du patin à glace et j’aimerais bien être au top de ma beauté.
Je souris. Dimitri est le nouveau mec de Nina. Elle les épuise assez rapidement, alors, c’est vraiment très attentionné de sa part de vouloir leur offrir la meilleure expérience de romance avant de les mettre à mort. Je termine de me maquiller en vitesse. De toute façon, j’en fais rarement des tonnes. Un coup de brosse et de mascara et une touche de baume à lèvres teinté, et puis c’est tout.
Je sors de la salle de bain au moment où Nina quitte la cuisine avec un café fumant qu’elle me tend. Je m’en saisis avec gratitude avant de me diriger vers le salon de notre petit appartement.
— Ça ne t’embête pas si je change la bande-son deux minutes, Nina ? J’ai une envie subite de Sonic Youth.
Je déteste la musique de Sonic Youth, elle me donne le mal de mer, mais je soupçonne Axelle et Nina d’en avoir besoin pour s’épanouir. Je tripote mon téléphone pour trouver un morceau acceptable, puis je me laisse tomber dans le canapé pour siroter mon café et évaluer la situation.
On est déjà le 15 décembre, donc d’après moi, c’est normal qu’on soit entrés en mode « Noël à fond les ballons ». Devant moi, sur la cheminée condamnée qui sert désormais à ranger des livres, j’ai accroché plusieurs grandes chaussettes bariolées que j’ai tricotées moi-même au cours des années. Pour les motifs, je prends des dessins traditionnels de Noël, des flocons, des étoiles, des rennes, des bonshommes de neige, des pères Noël, des sucres d’orge… et pour les couleurs, plus il y en a, mieux c’est. Les chaussettes géantes sont la seule chose que je sois capable de fabriquer, mais j’ai fini par devenir assez forte au cours des années. Il y a donc sept chaussettes géantes et ça va faire un mois que j’œuvre à les remplir de petits cadeaux pour Nina : des bonbons, des gadgets comme des mini-crayons parfumés ou des boucles d’oreilles fantaisie ou des sachets de thé aux épices, des petits articles de maquillage.
Note sur 20 : environ 27.
Ensuite, il y a le sapin. Il est grand, il est vert, il sent magnifiquement bon la forêt de résineux. Je l’ai décoré de boules dorées et de petits personnages adorables accumulés au fil des hivers, ainsi que de myriades de petites bougies qui constitueraient peut-être un risque d’incendie si elles étaient laissées sans surveillance, mais qui sont vraiment trop jolies. Cet arbre est tout simplement exquis. Pour cacher son pied, j’ai emballé des faux cadeaux que je remplace peu à peu par des vrais, au nez et à la barbe de Nina. Je souris affectueusement à l’arbre tout en lui attribuant un 30/20.
Le reste de la décoration… Hum, c’est vrai que j’ai peut-être un peu dépassé les bornes par endroits. Chaque surface libre est couverte de santons, d’angelots, d’étoiles brillantes, de bougies, de lampes d’ambiance. Tous les soirs, j’ouvre religieusement une fenêtre du calendrier de l’avent fait maison, avec des petites gravures anciennes et des pains d’épices. (J’en ai un autre sur ma table de nuit, rempli de chocolats, que j’ouvre le matin.)
Et je travaille dur pour que les trois grosses boîtes en fer blanc sur l’autre cheminée condamnée du salon soient perpétuellement garnies de petits sablés de Noël en forme de cœurs, d’étoiles, de sapins, etc., nappés de glaçages multicolores dans lequel je laisse se prendre des mignons mini-vermicelles en sucre roses.
Je crois que je comprends ce qu’Axelle veut dire. Je suis une sorte d’enthousiaste de Noël, oui, c’est vrai. J’aime Noël et ça se voit. Et cette année, encore plus que les autres. Je compte les jours jusqu’au solstice, parce que cette nuit-là, j’ai un rendez-vous d’un genre un peu spécial qu’il m’est impossible de ne pas anticiper avec grande… curiosité.
Je dois me rendre rue Monge chez les Jonas, et Cameron sera de notre côté du miroir.
… après, il se passe beaucoup de choses étranges 🤣
Les 6 premiers chapitres sont en ligne ici.
Et tous les liens de la série sont là.
à bientôt ! Et bon courage pour vos derniers projets de fin d’année !